mercredi 16 avril 2008

La tache

On a beau les prendre, les mots. On a beau les secouer, les découper, les mordre. Rien n’y fait. C’est pas la phrase qui fait le voyage.

Les mots restent plats. Vertical. Ça s’élongue, ça coule. Sur le même plan, cette horizontalité désespérante : on peut essayer de s’y glisser, en catimini, de passer, un bras, une jambe. Juste, pour voir.

On ne décolle pas. Il faudrait de la matière, des mots terreux, poudrés, gluants, mousseux. Qu’on les saisisse à pleines mains, qu’on s’en barbouille la figure. Les porter comme un grand châle, comme de la crème, s’en tartiner, le cou, la bouche, les tempes. En avoir tout autour, et même en soi, dans les narines, les puits respiratoires, les pensées, les veines, le nombril. Que ça nous englobe, jusqu’à la suffocation, une suffocation agréable, surprenante.

1 commentaire:

khâryatide a dit…

Des mots plats... dans ce cas-là, la polysémie ne vous va pas. Toujours est-il que je reviendrai m'en tartiner avec plaisir.